L’année 2011 touche à sa fin et les heureux lauréats du concours de l’ENA et du concours de recrutement complémentaire des magistrats administratifs (concours TACAA) vont bientôt intégrer leurs écoles respectives. Pour les candidats malheureux, les regrets s’estompent et la préparation pour la prochaine session s’organise. Mais des rumeurs de réforme viennent agiter ce tout petit monde. Tant les concours de l’ENA que le concours de recrutement complémentaire vont bientôt faire l’objet de profonds remaniements. Faisons le point sur ces rumeurs.
La réforme des concours de l’ENA : 2012, année charnière !
Selon les dires du directeur de l’École Nationale d’Administration, la réforme des concours de l’ENA entrera en vigueur pour les concours se déroulant en 2013, soit dans à peu près un an et demi. Si les grandes lignes du rapport remis par le groupe de travail semblent encore assez obscures, les choix devraient être arrêtés bientôt. Une rumeur semble avoir la cote : celle de la suppression de la 5e épreuve, épreuve de spécialité au choix. Exit donc le droit pénal, le droit civil, les maths ou les sciences politiques. Une nouvelle épreuve d’admissibilité la remplacerait-elle ? On parle beaucoup de l’instauration de Questions à Réponse Courte (QRC), grands classiques des concours administratifs mais aussi de la suppression des épreuves sportives pour l’admission. Mais rien n’est moins sûr.
En réalité, la réforme, annoncée depuis un certain temps, est encore en chantier. L’échéance de 2012 risque en effet de tout bouleverser. Si la victoire aux élections présidentielles se jouait entre Nicolas Sarkozy et François Hollande au second tour, l’issue de ce scrutin conditionnerait certainement les traits de la future réforme. Nicolas Sarkozy a toujours été très méfiant à l’égard de l’institution strasbourgeoise, critiquant ces élites dont il n’a jamais fait partie. Cette réforme, c’est la sienne, comme celle qui devrait toucher le classement de sortie. Mais en cas d’alternance, il est presque certain que le projet du gouvernement actuel sera remanié. François Hollande, énarque, a forcément un avis personnel sur la question et il parait très probable qu’il souhaite imposer sa vision du concours idéal pour l’école qui lui a apporté tant. Tout est donc suspendu au résultat des élections présidentielles de mai prochain.
La scission du concours de recrutement complémentaire
Depuis 2009, on évoque également une réforme du concours TACAA. On trouve ainsi mention de celle-ci dans un rapport d’information du Sénat relatif au projet de loi de finances pour 2010. Dans le dernier paragraphe de cet extrait, les sénateurs confirment la nécessité pour la justice administrative de renouveler de manière importante les magistrats qui vont partir à la retraite. Si certaines solutions évoquées ont déjà été mises en place, notamment l’abaissement de la limite d’âge, d’autres restent en projet, comme celle de la réforme du concours. Aujourd’hui, un point semble acté : le concours va se scinder en deux, entre concours externe réservé aux étudiants et concours interne réservé aux fonctionnaires ou agents de l’Etat en fonction depuis un certain nombre d’années.
Mais cette scission risque de s’accompagner de modifications : il apparaît difficile de justifier une scission sans changement des épreuves. Le concours externe devrait ainsi se rapprocher des concours externes d’autres institutions. Les rumeurs qui nous sont parvenues sont celles de la mise en place d’une épreuve de langues et d’une épreuve de culture générale. Toutefois les épreuves d’admissibilité actuelle, note sur dossier contentieux et dissertation, ainsi que l’entretien d’admission, ne devraient pas être affectées. Pour le concours interne, rien n’a filtré pour l’instant. Cette réforme se fera certainement en même temps ou peu après la réforme des concours de l’ENA. On parle aussi de mise en place pour le concours se déroulant en 2013. Cela paraît logique : le corps des conseillers de TA et de CAA est un corps issu de l’ENA et il est donc normal d’harmoniser les concours.
En tout état de cause, les candidats vont devoir s’adapter rapidement, une fois les textes adoptés. On peut espérer que cela sera fait en amont, dès l’été 2012 pour permettre ceux-ci mais aussi à toutes les formations de préparation, publiques et privées, de travailler dans un semblant de sérénité. D’ici là, les rumeurs iront bon train…
Pour en savoir plus sur ces concours, vous pouvez consulter les différents articles des CGA sur le sujet :
- Plongée au coeur des oraux de l’ENA
- Classement de sortie de l’ENA : chronique d’une mort annoncée ?
- Les résultats d’admissibilité du concours externe de l’ENA
- Les sujets 2011 de l’ENA (MAJ)
- Les résultats d’admission du concours de recrutement des magistrats administratifs
- Les résultats d’admissibilité du concours de recrutement complémentaire des magistrats administratifs
- Les sujets 2011 du concours de recrutement complémentaire des magistrats administratifs
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Merci pour ce billet. Toujours le grand flou…Dans le doute je continue le sport au 2è semestre. :p
Avec une épreuve de langue et une épreuve de culture G, le côté « atypique » du concours TA/CAA va quelque peu s’estomper…
Sait-on exactement à quels besoins répondent les projets de réforme des concours ? Par exemple, a-t-on constaté de lacunes en langue chez les conseillers de TACAA ? Les membres des autres corps recrutés par l’ENA ont-ils connu des changements, dans l’exercice de leur profession, qui rendent moins pertinente l’épreuve sportive ?
Pour le concours de TACAA, il n’y a pas spécialement de lacunes en langue chez les conseillers. En outre, ceux-ci ont interdiction d’utiliser toute autre langue dans le cadre de l’audience (la question pouvait se poser dans le cadre du contentieux des étrangers). C’est un vice de procédure qui conduit systématiquement à l’annulation. On se demande donc à quoi va bien pouvoir servir cette compétence en langues, sachant que tous les textes communautaires, tous les traités internationaux dont la France est partie et toutes les jurisprudences sont traduits en français. En réalité, c’est pour pouvoir opérer une distinction entre le concours externe et le concours interne qui va être créé. Il serait injustifiable de créer un concours interne sans avoir des épreuves différentes entre les deux concours.
Pour la suppression du sport au concours de l’ENA, la plupart des concours administratifs ne comportent plus d’épreuves physiques. Le concours de l’ENA fait figure de dernier résistant (avec les concours de la police, où l’épreuve physique a forcément une place prépondérante). Sa suppression mettra fin à la tradition du concours mais s’inscrit dans la droite ligne de modernisation des concours d’entrée dans la fonction publique.
De manière plus globale, comme l’indique le directeur de l’ENA dans son interview, il s’agit de recruter des hauts fonctionnaires qui montrent des compétences théoriques importantes (pour les épreuves d’admissibilité) et des aptitudes aux fonctions exercées par les hauts fonctionnaires (pour les épreuves d’admission). Il faut donc en déduire que le sport n’est plus une aptitude prépondérante chez les hauts fonctionnaires (une épreuve de maîtrise des outils informatiques serait plus logique dans ce cas !).
« serait injustifiable de créer un concours interne sans avoir des épreuves différentes entre les deux concours. »
La tradition, par exemple au concours de l’ENA ou à l’agrég du secondaire, n’est-elle pas de conserver à peu près le même nombre d’épreuves et les mêmes matières entre les deux concours, mais de remplacer les dissertations du concours externe par des notes de synthèse ou des épreuves pratiques au concours interne ?
« On se demande donc à quoi va bien pouvoir servir cette compétence en langues »
On peut comprendre qu’on veuille de favoriser les échanges avec des collègues étrangers, par exemple dans le cadre de colloques ou de visites officielles, de favoriser le rayonnement en incitant à publier dans des revues ou des ouvrages non francophones, à favoriser les recherches en droit comparé ou en géopolitique (pour le contentieux de l’asile ou de l’éloignement quand est invoqué par exemple l’art. 3 CEDH), ou encore à s’assurer de compétences généralistes en prévision d’une évolution de carrière du magistrat dans une autre administration. Mais on peut se demander quel doit être le poids (en termes de coefficient, de note éliminatoire, de caractère obligatoire ou non de l’épreuve) des aptitudes en (quelles ?) langues étrangères par rapport aux connaissances juridiques ou techniques (par exemple en informatique, médecine légale, travaux publics… domaines dont la connaissance ne semble pas exigée des magistrats).
« Il faut donc en déduire que le sport n’est plus une aptitude prépondérante chez les hauts fonctionnaires »
En fait ma question ne porte pas sur la pertinence de cette épreuve dans l’absolu, mais sur le fait qu’elle ait semblé pertinente à une époque, pour ne plus sembler pertinente par la suite, alors que les métiers n’ont pas sensiblement changé. J’ai l’impression qu’il y a toujours une épreuve de sport au concorus d’inspecteur du travail, est-ce dû au fait que ce métier comporte tellement de déplacements, parfois en milieu naturel ou industriel, qu’il en devient sportif ?