Entretien avec Rayan Nezzar, ancien stagiaire ENA à l’ambassade de France au Canada

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L’ambassade de France au Canada.
Auteur : SimonP / Wikimedia Commons

Aujourd’hui, nous vous proposons sur le site un entretien avec Rayan Nezzar, élève à l’Ecole Nationale d’Administration. La première partie de la scolarité à l’ENA est composée d’un module Europe, qui correspond à un stage au sein d’une institution européenne ou d’une institution française ou européenne à l’étranger. Rayan a effectué son stage à l’ambassade de France au Canada et a gentiment accepté de répondre à nos questions sur le fonctionnement général d’une telle structure et les métiers de la diplomatie. 

Peux-tu présenter les fonctions que tu as occupées pendant ton stage ?

En tant que stagiaire ENA, j’ai travaillé pendant quatre mois de janvier à mai 2014 auprès de l’Ambassadeur de France au Canada.

Une ambassade est constituée de plusieurs services avec des attributions propres. On y trouve notamment une chancellerie diplomatique, un service économique ou encore un service culturel. Pendant mon stage, j’étais rattaché à la chancellerie diplomatique qui, comme son nom l’indique, est chargée du suivi de la relation bilatérale.

Concrètement, il s’agit d’organiser les visites de personnalités publiques françaises au Canada, de rencontrer régulièrement les acteurs politiques et administratifs canadiens pour sentir le pouls du pays, d’en retranscrire la teneur au Ministère à Paris par voie de télégramme diplomatique, ou encore de représenter la France à de grands évènements qui se tiennent au Canada, tels que des commémorations.

Peux-tu nous parler de quelques missions que tu as effectuées ?

Ma mission principale a consisté à préparer la visite du Président François Hollande au Canada. Cela implique de préparer et de proposer le contenu et le parcours de la visite à la cellule diplomatique de l’Élysée, qui arbitre ensuite entre les différentes options.

L’un des enjeux principaux d’une visite d’État réside dans le choix de ses étapes. Les présidents français visitent en effet traditionnellement les provinces du Québec et de l’Ontario mais ne se sont jamais rendus dans l’Ouest du pays, qui est pourtant le plus dynamique économiquement aujourd’hui. C’est pourquoi il a semblé intéressant de proposer une étape à caractère économique dans une grande ville de l’Ouest, un peu sur le modèle de celle que le Président avait faite à San Francisco lors de sa visite d’État aux États-Unis.

Je n’aurai toutefois ni le plaisir ni l’honneur d’assister au déroulement de cette visite puisqu’elle est prévue pour l’automne, après la fin de mon stage.

Qu’as-tu retiré de ton stage ?

D’abord une fine connaissance de la vie politique administrative et politique du Canada. J’ai eu la chance de réaliser mon stage pendant la campagne électorale au Québec, dont a résulté une importante alternance politique avec la victoire du parti libéral.

Je pense aussi que nous pourrions beaucoup nous inspirer des pratiques canadiennes et notamment leur gestion des carrières et des équipes dans la fonction publique. J’en ai donc retiré quelques enseignements que j’espère pouvoir mettre en oeuvre lorsque je serai moi-même en poste à la sortie de l’école.

Et puis enfin, j’ai eu l’occasion de réaliser ce que l’on appelle des missions de représentation (commémorations, discours, etc). C’est une expérience stimulante qui m’a aussi préparé pour la suite.

Certaines choses t’ont-elles étonné ?

Ce qui m’a le plus surpris, c’est le large éventail de missions que remplit une ambassade. Je la pensais concentrée sur la relation diplomatique mais elle réalise aussi des missions de nature économique (analyse de la situation économique du Canada, accompagnement des entreprises françaises), culturelle (soutien à des manifestations francophones par exemple) ou encore judiciaire (coopération avec la justice canadienne sur certaines affaires).

Les grands ministères sont en effet représentés au sein de l’ambassade par un service d’une ou de plusieurs personnes. Le rôle de l’ambassadeur consiste dès lors à coordonner les travaux de ces services pour assurer la cohérence de l’action extérieure de la France.

Quels parcours avaient les personnes avec qui tu as travaillé ?

À la chancellerie, ils étaient tous diplomates de carrière, entrés au Quai par la voie du concours de secrétaire ou de conseiller des affaires étrangères. Sans flagornerie, je n’avais, jusqu’à présent, pas eu la chance de côtoyer des collègues d’une telle qualité intellectuelle. L’ambassadeur était sorti au Quai après l’ENA et a réalisé la quasi totalité de sa carrière au Ministère. Au cours de sa carrière, il a également occupé les fonctions de conseiller technique en cabinet ministériel et de préfet.

S’agissant des autres services, les profils étaient plus divers avec par exemple des administrateurs civils de Bercy au service économique ou des personnalités avec une expérience du monde des médias et de la publicité au service culturel.

Sais-tu si les ambassades françaises embauchent des stagiaires étudiants l’été ou à d’autres moments ?

Les ambassades ont constamment un ou plusieurs stagiaires selon les besoins. Les étudiants avec un profil grandes écoles peuvent par exemple postuler aux services économiques ou culturels. Ceux qui souhaitent devenir journaliste peuvent solliciter un service de presse. Il est même possible à des juristes de travailler auprès d’un magistrat de liaison présent en ambassade.

La réelle difficulté provient néanmoins de la sélectivité des stages proposés par le MAE ainsi que de leur financement. L’indemnité de stage proposée – autour de 400€ par mois – peut en effet difficilement couvrir les dépenses liées à une installation à l’étranger.

C’est donc un beau projet, mais un projet qui se prépare bien en amont, y compris financièrement.

Que conseillerais-tu à un étudiant qui souhaiterait travailler dans les métiers de la diplomatie ?

Les deux voies principales sont celles que j’ai évoquées : choisir le Quai à la sortie de l’ENA ou passer directement les concours dits « du Quai » (secrétaires et conseillers des affaires étrangères). Dans les deux cas, ce sont des concours exigeants, qui requièrent bien sûr beaucoup de travail, mais surtout un certain caractère moral pour tenir le coup pendant la longue préparation.

Je conseillerais donc à un étudiant souhaitant emprunter cette voie de bien être certain de sa motivation et, si possible, de la tester en faisant un stage de plusieurs mois pour découvrir le métier.


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